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La Montée de la violence contre les femmes dans la région MENA

Le centre ISIS pour les femmes et le Développement ainsi que la Fondation Konrad Adenauer ont organisé conjointement, du 29 mai au 31 mai, un Forum international traitant de « La Montée de la violence contre les femmes dans la région MENA»

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Détails

Si la violence à l’égard des femmes est un thème global, la montée de l’extrémisme religieux dans l’espace MENA a conduit au développement de nouveaux types de violences contre les femmes tout en exacerbant les anciennes pratiques. A titre d’exemple, les femmes se voient imposer le voile intégral, on leur interdit l’accès seule aux lieux publics, on assiste également à la montée des crimes d’honneur et des lapidations à mort en cas d’infidélité présumée, sans parler de l’esclavage des femmes et des filles... Les acquis fragiles sont donc battus en brèches par les mouvements extrémistes, faisant ainsi plus que jamais de cette problématique un enjeu régional majeur. Force est, en effet, de constater que le véritable lien partagé par ces groupes extrémistes, si éloignés géographiquement soit-il, repose essentiellement sur une haine commune de la femme, qu’ils tentent d’imposer au reste de la région. L’objectif majeur de cette conférence était donc de documenter et de dévoiler les nouveaux et les anciens types de violence contre les Femmes, ainsi que leurs conséquences sociales, économiques et politiques afin de proposer des solutions adéquates traitant les causes.

Concernant plus précisément le Maroc, si le Royaume est préservé de l’extrémisme par rapport à d’autre pays de la région, les violences faites aux femmes persistent et inquiètent les autorités. Les enquêtes faites par le Haut-Commissariat au Plan ont dévoilés des résultats alarmants puisque sur les 10 millions de femmes marocaines, 63% subiraient des violences chaque année. La majorité de ces violences sont, qui plus est, infligées par le mari. Toutefois, Nouzha SKALLI, Député à la Chambre des représentants et ex-ministre marocaine du développement social de la famille et de la solidarité, a mis l’accent sur le fait que le Royaume se distingue également des autres pays arabes par son processus de transition pacifique. A titre d’exemple, citons la réforme du code de la famille, qui met notamment en valeur le partage des responsabilités, ainsi que celle de la transmission de la nationalité par la mère. Ceci est rendu possible non seulement par les luttes de la société civile menées surtout par les associations pour les droits des femmes et par le rôle de sa Majesté Mohammed VI, qui s’est toujours engagé comme « leader de la cause de la femme ». En témoigne d’ailleurs le fait que la conférence fût organisée sous son haut patronage. Autant d’éléments qui justifient, en outre, la tenue du forum au Maroc.

Au Palais des congrès de Fes, l’évènement a accueilli plus d’une trentaine d’intervenant(e)s originaires de 22 pays différents ainsi que 150 participants. Si la région MENA était particulièrement représentée, à l’instar de participants venus du Maroc, d’Egypte, de Palestine, d’Oman, d’Algérie, de Jordanie, de Tunisie, du Bahreïn et du Liban, il n’en demeure pas moins que la thématique n’était pas seulement une question régionale mais conservait sa dimension globale. En ce sens, les prises de parole d’intervenant(e)s venus d’Europe , d’Asie, du Canada et des Etats-Unis ont permis d’élargir le débat sur les inégalités de genre.

Fatima SADIQI, présidente de l’association ISIS, et Dr. Helmut Reifeld, Représentant Résident de la KAS au Maroc, ont ainsi rappelé à l’unisson l’importance du caractère international de cette conférence. Cette dimension internationale se justifie à plus d’un titre. Tout d’abord, la défense des droits de la femme est un enjeu outrepassant les frontières et dont les meilleurs armes sont les regards croisés, qui permettent de partager différentes perspectives. Ensuite, la région MENA n’est pas seule responsable de l’amalgame fait entre extrémisme religieux et islam. En effet, si les extrémistes instrumentalisent l’islam afin de construire un faux discours religieux à l’encontre des femmes, le reste du monde, et en particulier l’occident, produit également à une représentation faussée de la femme en islam. Ces deux constructions participent, en outre, d’une influence réciproque. Or, comme l’a défendu Fatima HOUDA PEPPIN, ancienne député à l’assemblée nationale du Québec, « Nous n’avons pas à faire ici à un débat religieux car ce n’est pas l’islam ». L’enjeu de la conférence était donc en partie de lutter contre cet amalgame, qui puise dans l’islam les causes des violences faites aux femmes. Enfin, la dimension internationale du forum se justifiait également du fait des « djihadistes » étrangers, qui quittent leur pays pour venir répandre la violence dans la région MENA. Qui plus est, une grande partie de ces départs concernent aussi des jeunes femmes radicalisées par l’intense propagande que diffusent les extrémistes.

Fort d’une expérience partagée entre chercheurs, experts, politiciens et acteurs de la société civile, le Forum a permis de mettre en lumière de nombreux points nécessaires à une approche compréhensive et multidimensionnelle autant qu’à l’élaboration de recommandations pratiques.

L’un des premiers constats fait par les intervenants fut que malgré la présence de quelques hommes, ce forum confirmait le fait que la question de l’égalité entre les sexes reste souvent considérée comme une affaire féminine, qui ne s’améliorerait qu’aux dépends des hommes. Or, la cause de la parité ne doit pas être considérée comme un conflit d’intérêts mais plutôt être fondée sur l’idée d’une complémentarité entre homme et femme, qui doivent ensemble travailler sur ce sujet. Il est essentiel de faire ces précisions afin de bien définir l’approche à adopter car ceci évite également de tomber dans l’écueil d’une autre doxa erronée, qui considérerait comme une évidence le fait que la différence naturelle entre homme et femme serait synonyme d’inégalité et donc de rapport de force. Il s’agit de distinguer le sexe, issu de la nature, et le genre, construction sociale, qui participe d’un rapport de force entre les sexes. Ce travail conceptuel permet ainsi de mieux cibler les causes sociologiques, culturelles, politiques ou religieuses afin de remédier aux violences subies par les femmes.

Puisque les inégalités ne résultent pas d’un déterminisme religieux ou naturel mais d’une construction sociale, il apparaît ainsi clairement qu’il est indispensable d’accompagner les réformes législatives de l’élaboration d’un nouveau socle social façonné par l’éducation. L’éducation se fait à plusieurs niveaux, qui s’influencent réciproquement : à l’échelle de la famille, qui réalise une socialisation primaire en éduquant les enfants selon un prisme hiérarchique différencié entre fille et garçon. L’école et la société ont également un rôle essentiel et complémentaire à jouer dans l’éducation puisque l’éducation donnée par la famille dépend d’une part du rôle auquel la société prédestine filles et garçons et que d’autre part l’école est le relai de l’éducation familiale. Une réforme des cursus scolaires ainsi que des manuels scolaires est donc nécessaires pour accompagner les lois sur la parité et celle sur la protection des femmes. Il est entendu que ceci s’inscrit dans une logique de moyen-long terme qui se réalisera à travers un processus générationnel.

Les études ont également montré que si les violences infligées aux femmes concernent toutes les classes sociales, elles peuvent notamment être corrélées avec des facteurs tels que la pauvreté ou le niveau d’éducation. En ce sens, la lutte contre la pauvreté, la marginalisation autant que celle pour l’élévation du niveau d’éducation s’inscrivent dans la défense de la dignité féminine. La définition des causes passe donc par une démarche empirique, qui nécessite le développement d’instruments de récolte statistiques plus scientifiques. Les démarches actuelles se heurtent souvent à une culture du silence des femmes violentées, qui empêchent ces femmes de s’exprimer de peur d’être soit de nouveau violentées, soit d’être considérées par la famille comme une source de « discorde » et de « honte ». Cette culture du silence permet aux hommes de perpétuer leurs violences, il est donc indispensable de mettre en place plus de structures de prise en charge.

Du reste, il est entendu que les mouvements extrémistes ont développé de nouvelles formes de violence, la lutte contre le terrorisme orchestrée par les extrémistes religieux doit en ce sens être intégrée à toute stratégie de défense des femmes. Combattre le terrorisme nécessite une meilleure coordination entre les Etats ainsi qu’entre les sociétés civiles et ce dans le cadre d’une stratégie multidimensionnelle comprenant notamment : la lutte contre la propagande diffusée, en particulier, sur internet, la responsabilisation des médias, qui ne peuvent continuer à faire la publicité des terroristes car comme nous le savons le terrorisme a plus besoin de spectateurs qu’il n’a besoin de victimes, la lutte contre la marginalisation puisque les études ont montré que les groupes marginalisés forment la part du lion des « djihadistes » et enfin la prise en compte du rôle des occidentaux originaires du Maghreb. Marginalisés en occident, leur quête identitaire les amène à se radicaliser au profit d’une contre identité-occidentale incarnée par le wahhabisme. Ils viennent ensuite propager ces tendances en Afrique du Nord.

Enjeu régional, la problématique de « la montée des violences infligées aux femmes dans la région MENA », puise ses causes au niveau interne autant qu’à l’échelle internationale. Les nouveaux types de violences au même titre que les anciennes formes de violences impliquent, ainsi, une démarche compréhensive multidimensionnelle intégrant les différents acteurs du changement, acteurs étatiques, acteurs de la société civile ainsi qu’experts et chercheurs. Seule une stratégie concertée permettra d’analyser les causes réelles et d’éviter l’amalgame avec le déterminisme religieux afin d’élaborer des solutions adéquates.

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Palais des Congrés

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Dr. Helmut Reifeld

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Abir Ibourk

Abir Ibourk bild

Coordinatrice de Projet (Promotion de la Démocratie)

abir.ibourk@kas.de +2125 3776 12 32/33 +2125 3776 12 35
Allocution d'ouverture Konrad Adenauer Stiftung
Fatima Houda Pépin, parlementaires, Québec Konrad Adenauer Stiftung
Participants of the conference Konrad Adenauer Stiftung
N/T Konrad Adenauer Stiftung
Participants of the conference Konrad Adenauer Stiftung

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Bureau de la Fondation au Maroc