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Reportages pays

Niger: Retour à une démocratie constitutionnelle

de Klaus D. Loetzer, Maria Zandt

Avant les élections - les militaires font figure de garants de rapports démocratiques

Le 31 janvier ont lieu au Niger les élections législatives et présidentielles pour que par voie pacifique le pays puisse retrouver ses structures démocratiques. La junte militaire a prévu retourner le pouvoir à un gouvernement civil démocratiquement sorti des urnes le 6 avril. Déjà, les élections communales du 11 janvier constituent un avant-goût pour d’éventuels favoris mais aussi des défis pour l’organisation d’une élection dans l’un des pays les plus pauvres du monde.

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Trois favoris pour la présidence

Malgré une histoire mouvementée par des coups d’Etat, des renversements de gouvernements, le paysage politique au Niger est resté stable ces vingt dernières années. Quatre grandes figures déterminent les événements politiques. Dans le cadre des Présidentielles du 31 janvier, trois d’entre eux sont à nouveau favoris pour la fonction de Chef d’Etat. Seul en est exclu l’ex-Président Mamadou Tandja, qui après la prolongation manquée de son mandat, s’est retrouvée placé en résidence surveillée par la junte, et mis en prison pour des accusations de corruption après la levée de son immunité le 16 janvier 2011

La course entre les trois favoris, le socialiste Mahamadou Issoufou, l’ancien Premier Ministre Hama Amadou et l’homme du parti du Président Tandja, Seini Oumarou est ouverte et alimente les spéculations. L’ex Président Mahamane Ousmane fera juste figure d’outsider. En somme, la cour constitutionnelle a enregistré dix candidats. Avec la sociologue Bayard Mariana Gamatié, ce sera la première fois dans l’histoire du Niger, qu’une femme se lance dans la course présidentielle, la plus haute fonction de l’Etat.

Mahamadou Issoufou, Président au troisième essai

En tant que parti d’opposition de toujours, le parti socialiste, Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (le PNDS) a peut être maintenant la possibilité de voir son candidat élu Président. Contrairement aux autres candidats concurrents, Mahamadou Issoufou n’a été que Premier Ministre et pour une durée de neuf mois de 1993 à 1994. Deux fois déjà, il a perdu aux Présidentielles de 1999 et 2004 contre l’ex Président Tandja. Membre actif de l’Internationale Communiste, il entretient des relations fraternelles avec le Libyen Muammar Gaddafi. Bien que son parti lui ait récolté le plus de voix aux élections communales, M. Issoufou est un outsider contre les alliances qu’on formées les candidats concurrents.

Hama Amadou, une revanche tardive contre Tandja

En tant qu’ancien Premier ministre sous l’ex Président Tandja, Hama Amadou est tombé en disgrâce et a été mis en prison pour une prétendue affaire de détournement de fonds en 2007. Une victoire aux élections avec le nouveau parti qu’il a fondé le Mouvement Démocratique Nigérien (Moden/LUMANA) serait une revanche tardive sur le Président Tandja. Son parti qu’il a formé après l’éclatement de l’ancien parti au pouvoir le Mouvement National pour la Société de Développement (MNSD) s’est hissé au troisième rang des résultats. Cela donne de la motivation à ses sympathisants.

Seini Oumarou

En tant que successeur de Mamadou Tandja à la tête du MNSD, Seini Oumarou est un nouveau venu dans la campagne présidentielle. Il a déjà été Premier Ministre sous Tandja de 2007 à 2009, ce qui ne lui a pas pour autant apporté l’expérience et la renommée de ses concurrents. Il s’illustre comme une force modérée et rassembleur, qui peut réunir autour de lui les voies sur toute l’étendue du territoire national. C’est un atout que le MNSD soit présent dans tous les coins du pays. Cependant, beaucoup voient en lui la main droite du Président Tandja qui a trahi son pays. Ainsi, le MNSD a perdu lors des élections communales la moitié de ses voies au profit du Moden/ LUMANA.

Mahamane Ousmane, l’outsider

En tant que Président du groupe ethnique des Housa, Mahamane Ousmane a dirigé le pays de 1993 à 1996. Depuis son départ du pouvoir par les militaires, Mahamane Ousmane s’est présenté à chaque élection présidentielle. De 1999 à 2009, il fut Président du parlement. Les élections communales ont toutes fois montré que son parti, la Convention Démocratique et Sociale (CDS), ne joue plus un rôle de premier plan. M. Ousmann est aussi un candidat controversé à l’intérieur du parti.

Une décision controversée de la cour constitutionnelle annule plusieurs listes de partis.

Parallèlement aux Présidentielles, étaient aussi organisées des élections législatives. La décision de la cour constitutionnelle d’annuler plusieurs listes pour non respect de la loi électorale a suscité des protestations de la part des partis concernés. Et pour cause, la disposition portant obligation pour les listes régionales de partis d’être composées à hauteur de 75 pourcent de candidats pouvant justifié d’avoir fait tout au moins le secondaire. Dans un pays composé à 80 % d’analphabètes, cela sera bien difficile à réunir. Le mal dans cette décision, c’est qu’il n’entraine pas l’exclusion de candidats indépendants, isolés mais de listes complètes régionales, du moment où certains partis ne pourront pas se présenter dans leurs fiefs. C’est ainsi que les listes des poids lourds de la politique, Mahamane Ousmane (CDS) et Seini Oumarou (MNSD) se trouvent écartées des législatives.

Des candidats exigent le report des élections.

Neuf des dix candidats, face aux multiples problèmes liés à l’organisation ont exigé le report des élections pour trois semaines. Mais le chef de la junte l’a refusé. Les élections communales du début janvier 2011 avaient déjà montré de quels défis cela relevait pour un des pays les plus pauvres du monde d’organiser des élections. Plusieurs irrégularités avaient été remarquées lors des élections municipales. Ainsi, beaucoup de partis n’avaient pas pu imprimer les bulletins en couleur comme cela se doit et les distribuer dans tous les coins d’un pays environ quatre fois plus grand que l’Allemagne. Bien souvent, c’est déjà le carburant qui fait défaut. Ces problèmes organisationnels demeurent un défi malgré le soutien massif de donateurs internationaux, en particulier, l’Union Européenne (U.E.), le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Les élections communales d’il y a trois semaines ont servi de test pour les élections du 31 janvier. La commission électorale et les donateurs ont promis d’ici là de pallier aux insuffisances.

Aperçu général

Les élections présidentielles et municipales du 31 janvier marquent un tournant dans l’histoire récente du Niger. Cela va constituer une preuve de la consolidation de la démocratie du pays, si on arrivait à organiser des élections libres et transparentes et remettre le pouvoir à un gouvernement civil le 06 avril. Ce sera également un exemple pour d’autres pays africains où les militaires bien souvent jouent un rôle plutôt négatif. Dans le cas du Niger, les militaires réussiraient à montrer qu’ils sont garants du respect de la constitution et des lois fondamentales. Un autre point positif à noter est que la junte n’a présenté aucun candidat pour les présidentielles, et n’a même pas soutenu un seul d’entre eux. Cependant l’élection d’un proche de Tandja n’est pas dans leur intérêt, car celui-ci ne les laisserait pas s’en sortir sans laisser des plumes.

Ces élections vont réorganiser le paysage politique, après la scission du MNSD, qui jusqu’à maintenant est resté dominant. Il est ici intéressant de remarquer qu’en réponse à l’exclusion des listes régionales de partis, une alliance de partis a été formée par six des dix candidats présidentiables, l’Alliance pour la Réconciliation Nationale (ARN). Les membres de l’ARN voulaient se soutenir réciproquement lors des législatives. Seul outsider des favoris aux Présidentielles est Mahamadou Issoufou. S’il doit y avoir un deuxième tour le 12 mars, alors il faudra certainement procéder à la formation de nouvelles alliances.

Reste à savoir, si les élections vont-elles apporter la stabilité politique longtemps souhaitée. Pour mieux accompagner le transfert pacifique du pouvoir des militaires à un gouvernement civil, et pour renforcer les nouveaux élus du peuple dans leur rôle, le Programme régional pour le Dialogue Politique en Afrique de l’Ouest de la Konrad-Adenauer-Stiftung, va soutenir les activités de dialogue entre Armée et Politiques, de même que la formation continue des parlementaires.

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Interlocuteur

Florian Karner

Florian Karner

Représentant Résident et Directeur du Programme Régional Dialogue Politique en Afrique de l'Ouest

florian.karner@kas.de +49 30 26996-1035
+225 27 22 48 1800

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