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La relation franco-allemande un an après le début de la guerre en Ukraine

von Amélie Starigk

Rencontre entre les boursiers de la Konrad-Adenauer-Stiftung et Prof. Hans Stark

Le 17 février 2023, le bureau de la KAS Paris a eu le plaisir de recevoir le professeur de civilisation allemande à Sorbonne Université Hans Stark, dans le cadre d’un échange avec les boursiers français et allemands de la KAS. Un an après le début de la guerre en Ukraine le 24 février 2022, M. Stark a partagé avec les boursiers son analyse sur le partenariat actuel entre la France et l’Allemagne et sur la position de leurs gouvernements vis-à-vis de la Russie, puis a répondu à de nombreuses questions au sujet de la politique énergétique, de défense et de sécurité actuelle menée dans ce contexte par la France et l’Allemagne.

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Bilan des relations franco-allemandes dans le contexte actuel

S’agissant des relations franco-allemandes actuelles, Hans Stark salue la logique de travail bilatérale qui s’est progressivement installée entre la France et l’Allemagne à l’occasion de nombreux projets politiques, culturels et économiques à succès. Toutefois, les relations franco-allemandes traversent actuellement une crise profonde causé par la hausse des prix de l’énergie ainsi que par la fin de l’approvisionnement des hydrocarbures russes, dont l’Allemagne était tout particulièrement dépendante. Indirectement, la guerre en Ukraine a donc eu un impact important sur les relations franco-allemandes. En outre, Olaf Scholz, récemment élu à la chancellerie, doit encore s’imprégner des particularismes de la relation franco-allemande. On peut y ajouter le fait que le curseur de l’Allemagne se place actuellement davantage sur l’Europe de l’Est que sur la France, ce qui a pu être interprété comme une forme de négligence par le partenaire français.

 

Concernant les partenariats des deux pays avec la Russie, ceux-ci se sont fortement dégradés avec l’arrivée de la guerre, particulièrement dans les domaines de l’énergie et de l’économie. Avant le déclenchement du conflit, Emmanuel Macron avait tenté, en vain, de renouer le dialogue avec Vladimir Poutine suivant l’invasion de la Crimée à l’occasion de deux visites d’Etat. Il y aurait donc une certaine part de naïveté du côté français, qui a pensé pouvoir maintenir une relation constructive avec le régime de Poutine, dont l’attitude est aujourd’hui teintée de bellicisme et d’agressivité.  

 

De son côté, l'Allemagne a elle aussi mis fin à son partenariat stratégique avec la Russie. En ce sens, le gouvernement allemand a annoncé l’année dernière la mise en place d’une politique de subventionnement massif à destination des entreprises mises en difficulté par la crise énergétique et de l’armée ukrainienne en matière d’armement et de défense.

 

Crise énergétique et indépendance énergétique de l’Europe

Sur la question énergétique, la sortie du nucléaire côté allemand et le maintien d'un mix énergétique français fondé à 75% sur le nucléaire reflète l’incompatibilité des politiques françaises et allemandes dans un contexte de hausse des prix d'énergie . Hans Stark parle d’un potentiel de nuisance considérable des relations entre la France et l’Allemagne, qui s’est traduit récemment par l’opposition de la France au projet d’extension d’un gazoduc en Méditerranée soutenu par l’Allemagne ou encore par l’opposition de l’Allemagne à l’entrée de l’hydrogène dans les critères de la taxonomie verte à Bruxelles, fermement critiqué par la France.

 

D’après Hans Stark, l’Europe n’est pas dépendante de la Russie en matière d’énergie, elle est dépendante d’un modèle économique fondé sur des hydrocarbures et le charbon bon marché en provenance de Russie.

A l’inverse de l’Europe, les États-Unis ont opté pour une indépendance énergétique complète avec le « fracking ». L’idée est d’interrompre le partenariat énergétique avec la Russie tant que celle-ci pas mis un terme au conflit, à ses réflexes impérialistes et à sa politique autocratique et d’avoir alternativement recours au gaz liquéfié qatari, américain et à celui d’autres pays producteurs qui pourrait combler les besoins du continent en termes de gaz.

Pour parvenir à un nouveau modèle énergétique, nous devons cependant accepter un modèle économique dans lequel l'énergie n'est plus bon marché. La question n’est donc pas celle de l’indépendance mais du prix que nous sommes prêts à payer.

 

 

Positions de la France et de l’Allemagne vis-à-vis de la guerre en Ukraine

La Russie a décidé de mener un conflit d’une violence inouïe dans lequel elle s’attaque aux civils, à leurs habitations, civils et infrastructures ukrainiennes. Des dizaines de milliers d’enfants ont été séparés de leurs parents et d’innombrables massacres ont été commis sur les civils. Partout, le conflit est d’une horreur absolue du point de vue du droit international. Ainsi, un réel changement de paradigme de politique de défense s’impose en Allemagne à partir du 24 février 2022.

 

Face à ce caractère d'extrême violence commis par les Russes dans cette guerre, la question de la livraison des chars s’est posée à partir de l’automne 2022 et s’est finalement concrétisée en janvier 2023 par la décision française de livrer des chars de combat blindés à l’Ukraine, suivie par le feu vert de l’Allemagne et de la Pologne pour la livraison de chars Léopard. L'opinion publique allemande soutient en majorité l’aide militaire apportée à l’Ukraine.  

 

Toutefois, la France et l'Allemagne sont loin d’être les leaders de l’Europe dans cette guerre, contrairement à la Pologne, qui tout comme les pays baltes et le Royaume-Uni, adopte un positionnement bien plus ferme vis-à-vis de Moscou. En Allemagne et en France, la stratégie consiste à maintenir un dialogue avec Poutine dans l’espoir qu’il cesse un jour les hostilités, stratégie qui a eu le succès que l’on connait.

 

Malheureusement, les appels à la paix en France et en Allemagne ne font pas sérieusement avancer la situation, car pour les Russes, la guerre s’arrêtera uniquement lorsque l’Ukraine fera partie intégrante de la Russie. Toutefois, le conflit pourrait s’arrêter avec l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN. Néanmoins, les occidentaux craignent qu’une reprise des hostilités déclenche un nouveau conflit avec les membres de l’OTAN au nom de l’article 5 du traité fondateur de l’OTAN qui prévoit le principe de la défense collective.

 

Quel scénario géopolitique pour la suite ?

A la fin de la rencontre, les boursiers se sont interrogés sur la suite des évènements un an après le début de la guerre en Ukraine.

D’après Hans Stark, les évènements actuels sont loin de présager la fin du conflit. La haine omniprésente projetée par la Russie contre les occidentaux ainsi que la volonté d’envahir l’Ukraine est toujours aussi omniprésente un an après le début de la guerre. La Russie, qui ne se contentera pas de l’envahissement du Donbass et de la Crimée, souhaite avant tout poursuivre la guerre jusqu’à l’absorption totale de l’Ukraine au sein des frontières russes. Cependant, cela ne signifie pas qu’elle y parviendra, car l’espoir et la résilience subsistent du côté ukrainien.

 

Dans les prochaines années, une utilisation de l’arme nucléaire est à exclure, car aussi bien les soutiens au Kremlin que ses plus fervents opposants ne souhaitent s’engager dans une guerre nucléaire. Il est toutefois possible que le conflit soit momentanément gelé du fait de la perte importante de soldats et du manque crucial de matériel militaire, laissant les lignes de front inchangées. Dans ce cas, une nouvelle offensive pourrait se préparer pour 2026 ou 2027 avant l’entrée de l’Ukraine dans l’OTAN.

 

 

Amélie Starigk, Boursière BoursEngagement du Bureau France de la KAS

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